Si Sébastien Lecornu n’était pas présent au congrès des régions, son ombre a largement plané sur le 21e congrès des Régions de France qui s’est tenu, jeudi dernier, à Versailles.
Absent des travées du palais des Congrès, le Premier ministre a préféré participer, en coulisses, à une « réunion de travail de deux heures » avec les représentants des régions durant laquelle il aurait convenu que l’effort des collectivités devait être revu à la baisse.
Ramener l’effort « autour des 2 milliards » d’euros
Il ne sera donc vraisemblablement « pas de 4,7 milliards » d’euros comme prévu dans le projet de budget pour 2026, selon la présidente de Régions de France, Carole Delga (PS). « On ne peut pas vouloir une grande relance de la décentralisation et, dans le même temps, priver les collectivités locales de leurs moyens d’agir », avait d’ailleurs prévenu, en ouverture du congrès, celle qui est aussi présidente de la région Occitanie, dénonçant des mesures « mortifères » inscrites dans le prochain budget de l’État.
Convenant en clôture de congrès que « nous ne pouvons pas continuer sur cette trajectoire budgétaire qui nous amène à un étranglement par une dette trop élevée », Carole Delga a, toutefois, estimé que « nous devons toutes et tous faire des efforts, mais des efforts proportionnés ». Plaidant pour « un budget de compromis », elle a ainsi demandé que l’effort réclamé aux collectivités en 2026 soit « ramené autour des 2 milliards » d’euros pour « ne pas ajouter une crise territoriale » à la crise budgétaire.
Un montant qualifié de « bon calcul » et d’« effort plus juste » par Carole Delga, qui s’est également opposée au « remplacement » de la TVA affectée aux régions – voire même son « écrêtement » – par « une énième DGF », comme prévu dans le projet initial du gouvernement. « La DGF actualisée, cela dure le temps d’un printemps. Et le printemps suivant cela n’existe plus, quel que soit le gouvernement », a-t-elle rappelé.
Travailler « avec les parlementaires »
La présidente de la région Occitanie a notamment salué « l’ouverture du Premier ministre » sur le financement des formations professionnelles, une des compétences régionales, pour lesquelles il manquerait 280 millions d’euros. Sébastien Lecornu aurait ainsi indiqué que « ce ne serait pas ce montant-là » et qu’il y aurait « un travail à mener avec les parlementaires ».
Le Premier ministre « s’est engagé à regarder cette question », a confirmé la ministre de l’Aménagement du territoire et de la Décentralisation, Françoise Gatel, au moment même où les députés se sont prononcés hier en faveur de la création du « réseau France Santé » voulu par l’exécutif pour améliorer l’accès aux soins sur le territoire, dans le cadre du projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS).
« On ne peut garantir une offre de santé à 30 minutes de chacun de nos concitoyens que si nous avons des personnels formés », a reconnu l’ancienne sénatrice, en soulignant que « le Premier ministre a entendu [les] préoccupations [des régions], il a entendu votre souhait d’autonomie, votre préférence entre une dotation et une part de TVA… »
Appelant elle aussi à « sortir un budget de compromis et de consensus » qui « ne sera celui de personne », elle a dit « savoir l’attention du Sénat pour que l’atterrissage budgétaire concernant les collectivités soit équilibré et proportionné ».
Comme l’an passé, les collectivités pourront, en effet, compter sur la Haute-Assemblée qui a, d’ores et déjà, rejeté l’idée d’un effort de 4,7 milliards d’euros. Son président, Gérard Larcher (LR), l’a d’ailleurs rappelé, jeudi : « Les efforts à réaliser ne peuvent pas dépasser les 2 milliards ». « Pas par corporatisme, pas par clientélisme », mais parce que « 70 % de l’investissement public dans ce pays » est le fait des communes, des intercommunalités, des départements et des régions, a souligné le président de la Haute Assemblée.
Cycle de rencontres avec les élus locaux
Par ailleurs, les régions ont très largement insisté pour réaffirmer leur rôle alors que « notre modèle fondé sur le centralisme et le jacobinisme se fissure de toutes parts ». « Les régions sont à l’avant-poste des solutions pour lutter contre les déserts médicaux, pour trouver des solutions de mobilité au quotidien, pour assurer la réindustrialisation », a ainsi rappelé Carole Delga.
On peut aussi souligner que « la réunion de jeudi marque le début d’un cycle de rencontres avec les élus locaux, qui devrait se prolonger avec les départements (dont le congrès est programmé du 12 au 14 novembre), puis avec les maires (qui se réuniront du 18 au 20 novembre) », selon Le Monde qui cite des conseillers du Premier ministre.
Reste que l’avenir des textes budgétaires est encore loin d’être certain, notamment au regard des délais constitutionnels qui semblent désormais quasiment impossible à tenir. Le sort du gouvernement est tout aussi indécis puisque la France insoumise envisage de déposer une nouvelle motion de censure contre l’exécutif dans un mois, quand les projets de budgets de l’État et de la Sécu approcheront de leur terme, a déclaré hier le député « insoumis » des Bouches-du-Rhône Manuel Bompard.
« Il me semble évident que, avant Noël, sans doute au début du mois de décembre, il y aura une nouvelle motion de censure parce que tout le monde aura sous les yeux, à ce moment-là, la réalité de ce que sont le budget de l’État et le budget de la Sécurité sociale », a déclaré le coordinateur de LFI.
SOURCE : MAIREinfo – Édition du lundi 10 novembre 2025






