Parmi les nombreuses mesures proposées hier par le Premier ministre François Bayrou, plusieurs concernent les collectivités (lire article ci-contre) qui vont devoir, selon les mots de François Rebsamen, ministre de l’Aménagement du territoire, contribuer « à l’effort national » à hauteur de 5,3 milliards d’euros, soit « 13 % de l’effort global ».
Si les associations d’élus mesurent toutes l’ampleur de la crise budgétaire que connaît le pays, le choix politique arbitré par le gouvernement est unanimement dénoncé. « L’effort » demandé par le gouvernement est, selon les associations, non proportionné, et fait peser de graves risques sur l’investissement public et par extension l’action publique locale.
Pour un effort « proportionné » et « équitable »
Face à ces annonces, les associations appellent le gouvernement à « éviter toute approche uniforme dans la répartition de l’effort budgétaire » (Villes de France), à « ne pas s’engager dans une logique austéritaire et contracyclique » (APVF) et à ouvrir « un dialogue avec l’ensemble des associations d’élus dans les tous prochains jours » (Régions de France).
En effet, les collectivités – qui avaient déjà été lourdement mises à contribution dans le budget 2025 – dénoncent une participation toujours plus importante des collectivités territoriales à l’effort budgétaire collectif. Pourtant, « se contenter, comme l’a indiqué le Premier ministre, de « contenir la hausse des dépenses », sans évoquer le périmètre d’action de l’État et en aggravant encore les prélèvements, ne pourra suffire à redresser durablement la situation » , peut-on lire dans le communiqué de l’AMF.
Régions de France indique qu’il est « aujourd’hui demandé aux collectivités territoriales, qui ne pèsent que 5,9 % de la dette publique, d’assurer 12,1 % de l’effort national » et qu’à l’inverse, « l’État et ses opérateurs, qui représentent 83,4 % de la dette publique, n’auraient à fournir que 22,8 % de l’effort. » Les élus de l’Anem soulignent par exemple que « les collectivités de montagne ont déjà été largement mises à contribution en 2025 avec la baisse des dotations, la diminution drastique du Fonds vert, le prélèvement Dilico de 13,6 millions d’euros et l’amputation des crédits de paiement des CPIER passant de 148 millions d’euros en 2024 à 40 millions en 2025. » Pour l’AMF, « cet effort imposé ne saurait en aucun cas être considéré comme équitable. »
François Sauvadet, président des Départements de France, indique que « l’annonce de l’augmentation du Dilico et l’écrêtement de la TVA ne sont pas une solution » ajoutant au passage que les départements ont déjà « perdu 46 milliards d’euros de dotations depuis quinze ans. »
Villes de France rappelle d’ailleurs « que les besoins de financement des collectivités diffèrent fondamentalement de ceux de l’État » car « les collectivités n’empruntent que pour une partie de leurs investissements au service de la population (réseaux, écoles, équipements sportifs…) et non pour financer leur fonctionnement courant. » D’ailleurs, l’AMF met en cause « un centralisme excessif, qui conduit l’État à s’occuper de tout et prélever sans cesse davantage sur les entreprises, les particuliers et les collectivités ».
Interrogé par l’AFP, André Laignel, président du Comité des finances locales (CFL) et premier vice-président délégué de l’Association des maires de France (AMF), dénonce des économies « inacceptables pour l’ensemble des élus locaux » et ajoute que si ces pistes sont « maintenues, nous serions conduits à en appeler au Parlement pour refuser ce budget ».
Des conséquences dans les territoires
« Ces annonces interviennent alors même que l’Insee a révélé, il y a quelques jours à peine, l’explosion du taux de pauvreté en France (lire Maire info du 10 juillet) » , peut-on lire dans le communiqué de l’Union nationale des centres communaux d’action sociale (UNCCAS). « Hébergement d’urgence, précarité énergétique, aide alimentaire, maintien à domicile, santé mentale… Les services publics locaux sont à la limite de la saturation. Les mesures annoncées, loin de répondre à cette crise sociale profonde, ne feront qu’en aggraver les effets. » Conséquence : « Ce sont des situations humaines qui se dégradent, des travailleurs sociaux et des élus locaux qui devront faire face, sans moyens supplémentaires. » Pour l’APVF également ce choix politique « aggraverait la situation de nos concitoyens les plus fragiles ».
« Quel est donc le sens des coupes opérées sur des budgets locaux qui financent 70 % de l’investissement public ? », s’interrogent les élus de l’AMF.
Ce choix politique, prévient Régions de France, conduira « inéluctablement à un abaissement massif des investissements des Régions » entraînant une « réduction très nette des aides aux entreprises, ou en faveur du bâtiment et des infrastructures », « un ralentissement du choc d’offre ferroviaire », « moins d’investissement dans nos lycées » et « moins d’aides au tissu associatif et culturel. » Il fragilisera aussi les projets d’investissement local, « alors que ceux-ci représentent 70 % de l’investissement public national et sont le moteur de la vitalité des territoires » , souligne Villes de France qui explique que « la ponction supplémentaire sur les ressources des collectivités (Dilico 2) va conduire par exemple à une réduction sévère de l’investissement local et porter atteinte à la qualité du service public de proximité. » L’AMF ajoute que le Dilico n’est d’ailleurs « ancré dans aucune réalité financière, puisque les collectivités sont ponctionnées indépendamment de leurs charges ou même de leur niveau de population. »
Les associations d’élus demandent unanimement au Premier ministre de revoir sa copie et l’AMF appelle le gouvernement à choisir une autre voie en réduisant « les dépenses contraintes imposées par l’État aux collectivités, qui ne cessent d’augmenter » afin d’éviter de graves conséquences sur la croissance qui sont « en contradiction complète avec le plan « en avant la production » ».
SOURCE : MAIREinfo – Édition du mercredi 16 juillet 2025



